A sa demande, l'intersyndicale CFDT (Sgen, Finances, Interco et Santé-sociaux), FSU, UNSA et CGT a été reçue par le Préfet en audience le vendredi 24 mai pour continuer à faire entendre ses revendications communes face à la cherté de la vie en Haute-Savoie.
Déclaration intersyndicale :
« Monsieur le Préfet,
Le récent décret gouvernemental d’attribution de l’indemnité de résidence administrative aux agent.e.s des trois fonctions publiques de Haute-Savoie ne répond que partiellement aux revendications des organisations syndicales de la Fonction Publique du département, qui s’expriment depuis des décennies. Il s’agit certes d’un premier pas selon le Ministre.
Le montant de cette indemnité est bien trop modeste pour régler les principaux problèmes des agent.e.s par rapport au coût de la vie dans notre département. Les territoires de Haute-Savoie rencontrent d’importantes difficultés de recrutement et de fidélisation liées à la cherté de la vie se traduisant en particulier par des tensions spécifiques pour l’accès au logement, face à la concurrence des salaires genevois, accrue par le développement des moyens de transports transfrontaliers et la possibilité de télétravail.
Ces difficultés conduisent à des fermetures de lits dans les hôpitaux et les EHPAD, des postes non pourvus dans nos trois versants de la fonction publique (en gendarmerie, dans l’Education Nationale, ou bien encore dans les services des collectivités terriutoriales…), ainsi que des démissions ou des demandes de mises en disponibilité, ce que nous développerons dans la suite de notre intervention.
Le découpage retenu par le Ministère, à la commune près, nous interpelle.Les données sur lesquelles il s’appuie ne semblent pas correspondre à la réalité locale. Il est important que le gouvernement prenne en compte les spécificités des territoires limitrophes de la Suisse pour répondre aux difficultés rencontrées. C’est bien tout le département qui aurait dû passer en zone de vie chère, et l’indemnité de résidence réévaluée à la hausse afin de garantir un haut niveau de service public.
Trouver un logement à proximité de son emploi était une difficulté, cela devient un défi. Il en résulte des mouvements pendulaires éreintants, source de risques psycho-sociaux et étouffants financièrement : augmentation du prix du carburant, des péages, … Travailler ne permet plus de subsister.
Il y a urgence à favoriser l’accès au logement pour les agents de l’Etat. »
Chaque organisation syndicale a ensuite été amenée à s’exprimer ; le Sgen-CFDT a indiqué que ces constats largement partagés par l’ensemble des acteurs concernés (professionnels, institutionnels, politiques, syndicaux, parents d’élèves,…) devaient conduire à des solutions concrètes, qui dépendent de la volonté politique des décideurs. Beaucoup de personnels de l’Education Nationale sont exsangues financièrement et psychologiquement, du fait du coût de la vie, mais aussi de la pénurie, dans les écoles et établissements, de personnels que la cherté fait fuir. Parce qu’il devient impossible pour les agent.e.s de l’Education Nationale de vivre et de travailler décemment en Haute-Savoie, les problèmes d’attractivité, de recrutement, de fidélisation, de remplacement et de profond mal être des personnels mettent aussi en péril le service public d’éducation dans notre département, au détriment des élèves.
Si la mise en place d’une indemnité de résidence témoigne de la prise de conscience de la particularité du coût de la vie en Haute-Savoie, elle devrait alors naturellement s’appliquer à tous les fonctionnaires qui y travaillent, et s’assortir de vraies réponses en matière de logement.
En conclusion, l’intersyndicale a revendiqué plusieurs mesures :
« L’indemnité de résidence est une première réponse dont on se félicite, mais elle est injuste et insuffisante. Elle ne s’applique pas à l’ensemble des communes et son montant est trop faible pour compenser la cherté de la vie et pour avoir un réel impact sur l’accès au logement. De plus, elle induit une mobilité géographique ciblée sur les communes indemnisées au détriment des autres.
L’intersyndicale Fonction Publique 74 vous demande dont d’intervenir au plus vite :
- pour une généralisation de l’IR à l’ensemble des communes de Haute-Savoie
- pour l’augmentation de son montant
- pour la mise en œuvre des mesures d’aide au logement pour les agents publics comme annoncé par le Ministre
- pour la création de dispositifs particuliers à destination des agent.e.s les moins rémunérée.e.s »
Réponses du Préfet :
La prise en compte de la vie chère est une revendication datant des années 1970 et le Préfet reconnait avoir été saisi de cette problématique dès sa prise de fonction. Le constat est en effet partagé localement.
L’Indemnité de Résidence est un acquis qui témoigne de la prise en compte de la spécificité de la Haute-Savoie. Mais des maires évoquent eux aussi des distorsions sur le zonage.
Depuis fin mars 2024 aurait été décidée au niveau ministériel une réouverture de la liste au titre du zonage avec une actualisation de la cartographie, qui fonde à ce jour le classement des communes et donc l’application de l’IR.
La problématique du logement rencontre plusieurs difficultés liées notamment à la production, au coût du foncier, et à sa disponibilité. Produire plus suppose aussi une acceptation de la densification d’une part, et doit être mis en relation avec les contraintes et exigences environnementales d’autre part. Quant à la production du logement social, elle est-elle même corrélée aux opérations globales de logement du marché libre.
Le Préfet consent que l’on a besoin d’outils et que des mesures de fidélisation seraient pertinentes.
Sur le coût élevé de la vie, le travail frontalier (plus de 100 000 personnes) permet à la fois au département d’être l’un des plus riches, mais entraine en contrepartie de nombreuses tensions.
Or, une des préoccupations tient également au besoin croissant de recrutement en Suisse lié au vieillissement de sa population, et les conséquences en termes de pénurie dans la fonction publique se vérifient d’ailleurs aussi dans le secteur privé.
Au final, la Haute-Savoie est un département à deux vitesses.
En tant que responsable de l’Etat, le Préfet rappelle régulièrement que les missions des fonctionnaires sont essentielles et que c’est précisément lorsque l’on manque de fonctionnaires que l’on réalise à quel point ils sont indispensables à notre société. En effet, c’est parce que l’Etat fonctionne en matière de soins, d’éducation, de sécurité, etc … que le cadre de vie est possible pour tous.
Le Préfet s’est engagé à transmettre une note d’audience au Ministre de la Fonction Publique, Stanislas Guérini, qui avait d’ailleurs évoqué, lors de son déplacement à Saint-Julien à l’automne dernier, la poursuite de la mise en oeuvre des dispositifs de lutte contre la vie chère pour les fonctionnaires haut-savoyards.