Professeurs documentalistes : pour une reconnaissance du travail et l’égalité de traitement

L'action des professeurs documentalistes du 17 décembre dépasse la simple question de la prime "informatique" et revendique la reconnaissance d'une identité professionnelle trop souvent ignorée.
Billet d'humeur d’Agnès Prévelle , professeur documentaliste en lycée dans l'académie de Normandie.

Les professeurs-documentalistes engagent un mouvement de contestation le 17 décembre prochain. Au-delà du déclencheur, la création d’une exception pour exclure cette catégorie de certifiés de la prime informatique, c’est un mouvement plus profond qui appelle à la reconnaissance d’une identité professionnelle.

Des missions clairement énoncées par l’institution…

Après la création du CAPES en 1989, il a fallu attendre pas moins de 28 ans pour obtenir une nouvelle circulaire de mission (en 2017) qui définisse notre rôle au sein des établissements d’enseignement. Que dit cette circulaire, quel est le rôle des professeurs-documentalistes ?

– Nous enseignons dans notre champ d’expertise (les sciences de l’information et de la communication), il se doit de permettre aux élèves la maîtrise d’une culture de l’information et des médias. Vaste programme, que le professeur-documentaliste, sans programme et sans horaire, doit mettre en œuvre en fonction de son contexte local : quelles compétences développer, par quels enseignements, quels dispositifs ? Les compétences liées à l’information et à la communication sont de plus en plus prégnantes, comme en témoigne la création du « Grand oral » ; la formation du professeur-documentaliste devrait le situer comme interlocuteur privilégié pour ces apprentissages, pourtant les programmes n’y font pas référence. Il est ainsi amené à enseigner selon différentes modalités, qui préfigurent d’un enseignement curriculaire et décloisonné : il peut intervenir seul (en SNT au lycée par exemple), travailler en co-intervention (pour préparer un débat, apprendre à prélever des informations dans un document…).

Bref, le professeur-documentaliste doit mettre en œuvre une progression des apprentissages sans que rien ne soit prévu à cet effet. Pour remplir cette première mission, il doit donc souvent « mettre le pied dans la porte » !

– Nous organisons les ressources à disposition : numériques ou livresques, le professeur-documentaliste est chargé de proposer les ressources les plus adaptées au public, de les rendre accessibles, visibles et utilisables. Pour cela, il s’appuie sur des compétences bibliothéconomiques, sur la lecture attentive de l’ensemble des programmes d’enseignements en vigueur, et sur une veille informationnelle sur l’ensemble des champs disciplinaires, éducatifs et culturels.

Il doit également être en mesure d’organiser ces ressources dans un environnement technique mouvant : ENT, portails d’information, pratiques informationnelles propres à son établissement.

– Nous participons à l’ouverture sur l’environnement éducatif, culturel et professionnel de l’établissement. Ainsi, le professeur-documentaliste doit permettre aux élèves un accès à la culture, à la découverte de leur environnement, à travers des partenariats, des manifestations culturelles, des animations qui permettent aux élèves d’élargir leurs horizons.

Cette fonction s’appuie donc sur deux identités professionnelles fortes : l’enseignement et la documentation. C’est une spécificité, certes, mais aussi une opportunité pour les établissements : celle d’offrir aux élèves plusieurs modalités d’enseignement.

 

… mais des missions toujours insuffisamment reconnues

 

Ces missions peuvent-elles toutes être remplies depuis le CDI ? Non. Au-delà des 30 heures de présence, où nous nous consacrons aux séances pédagogiques, à l’accueil des élèves et à la gestion du fonds documentaire, il nous reste du travail : préparer ces séances, valoriser les ressources de l’établissement, contacter nos partenaires, évaluer les élèves sur les compétences dont nous avons la charge… Pourquoi, dès lors, un traitement différent des autres professeurs certifiés ? Pourquoi une indemnité la plus basse de tous les autres professionnels de l’enseignement (premier et second degré, CPE) ?

Le décret concernant la prime d’équipement informatique est, pour l’ensemble des professeurs-documentalistes, la goutte d’eau qui fait déborder le vase.

Décret du 5 décembre « Une prime d’équipement informatique est attribuée aux psychologues de l’éducation nationale stagiaires et titulaires et aux enseignants stagiaires et titulaires relevant du ministère chargé de l’éducation nationale, qui exercent des missions d’enseignement, à l’exception des professeurs de la discipline de documentation. »

Notre circulaire de mission, notre concours de recrutement nous situent pleinement comme des enseignants. Nous sommes face à des élèves, préparons des cours, évaluons, complétons des bulletins… En collège, certains d’entre nous sont professeurs principaux, et pourtant, une fois de plus, nous ne sommes pas reconnus par l’institution…

 

Professeurs 2d degré 

Professeurs-documentalistes

Indemnités ISOE part fixe : 1213,56 €/an ISP : 767,10 €/ an
Heures supplémentaires HSE de 39,91 à 63,44 €
exonérés d’impôts
Non
Agrégation Oui Non
Spécialité d’inspection Oui Non
Professeur principal de 906,24 € à 1425,84 € / an Non
« Devoirs faits » de 39,91 à 63,44 €
exonérés d’impôts
30 €
non défiscalisés
Prime d’équipement informatique 150 € / an Non