Déclaration préalable du Sgen-CFDT au CDEN de l’Isère du 9 novembre 2023
Cette déclaration porte sur quatre points qui sembleront ne pas avoir de lien entre eux ; les notions de sécurité et justice peuvent établir ce lien.
Le conflit israélo-palestinien
La gravité de la situation exige la mobilisation de tous aux côtés des camps de la paix israélien et palestinien. En France comme ailleurs, la rhétorique du pire et les jeux de postures ne sont pas à la hauteur de la situation et alimentent les discours haineux des extrêmes. L’assassinat de civils, y compris d’enfants, ne peut être justifié, relativisé ou passé sous silence. Se battre pour la paix, c’est aussi se battre contre l’antisémitisme et toutes les formes de racisme. Face à l’horreur, la CFDT appelle à un cessez-le-feu immédiat, à l’ouverture de corridors humanitaires et à la libération des otages et des détenus retenus sans fondement juridique.
Les alertes à la bombe dans les établissement scolaires
Des alertes à la bombe quotidiennes perturbent fortement le fonctionnement des lycées, en particulier ceux de l’agglomération de Grenoble.
Nous partageons les inquiétudes, et soutenons bien évidemment les mesures de prudence et d’urgence prises chaque jour.
Néanmoins il nous semble nécessaire de prévoir un ou plusieurs scénarios alternatifs en fonction de la suite des événements, afin d’anticiper au mieux et de sécuriser les personnels comme les élèves.
Les attentats terroristes visant des professeurs
Le 16 octobre 2020, le 13 octobre 2023, les deux assaillants qui ont tué Samuel Paty et Dominique Bernard s’en sont pris à l’École française pour ce qu’elle est et ce qu’elle fait. De ce point de vue, il serait illusoire d’imaginer que le risque zéro pourrait exister. Et si des enseignants, des personnels travaillant dans les établissements scolaires ont peur, ils sont aussi souvent plus déterminés à poursuivre leur travail, à faire école avec tous les élèves, parce que ce pour quoi l’École est attaquée est cela même qui donne du sens à leurs missions.
Attaquée parce que laïque. Attaquée parce qu’elle a pour but affiché d’émanciper, de construire chez chacun et chacune la capacité à penser par soi-même tout en reconnaissant l’Autre, en apprenant de lui. Attaquée parce qu’elle a pour but affiché d’être un espace social et institutionnel dans lequel il faut faire vivre autant que possible les valeurs qui sont affichées au fronton des édifices publics.
L’École peut beaucoup mais elle ne peut pas tout et il faudrait lui redonner une boussole claire et acceptée par tous, un horizon. L’École ne peut être seule un rempart, l’École ne doit pas devenir un sanctuaire clos sur lui-même. C’est toute la société qui doit faire bloc, ensemble, sans céder aux fauteurs de haine, en s’astreignant à l’exercice de l’honnêteté intellectuelle, en refusant l’hyperpolarisation de chaque débat et discussion.
Les annonces ministérielles
Pour le Ministre, l’École doit tendre vers l’excellence des savoirs quitte à ressortir les vieilles recettes éculées : restaurer l’autorité des maîtres, renforcer l’apprentissage des fondamentaux, avec un fil rouge, la nécessité pour les enseignants d’exercer leur métier dans le bonheur.
Pour le Sgen-CFDT, ces annonces du Ministre début octobre idéalisent une école passéiste loin des réalités des collègues partout en France.
Pour le Ministre, il faut mettre à plat les programmes dans le premier degré au nom de « l’exigence des savoirs ». Les programmes actuels, tous les enseignants le diront sont intenables tant ils sont denses. Pourtant, peu de chances qu’il soit décidé de les alléger tant les propos du Ministre tournaient autour de la nécessité d’excellence.
Pour le Sgen-CFDT, il convient avant tout de ne pas faire des enseignants des exécutants, mais de les considérer comme des ingénieurs pédagogiques capables de penser leur enseignement en fonction des besoins des élèves.
Le Ministre a la volonté de supprimer les cycles pour les transformer en groupes de niveaux plus modulaires notamment à l’entrée au collège, des groupes qui pourraient perdurer sur les autres niveaux de ce collège. Veut-on aller vers une plus grande individualisation des parcours des élèves au sein du collège unique ? Ce pourrait être une bonne chose à la condition expresse de permettre un travail plus collectif dans les établissements et les écoles, des échanges entre les collègues pour construire ces parcours.
Pour le Sgen-CFDT, tout cela n’est pas envisageable en l’état tant les personnels sont dans l’urgence permanente. Une chose est certaine, l’hétérogénéité est plutôt une richesse au sein d’une classe comme de nombreuses études le montrent. Il faudrait donc, pour une meilleure prise en compte des élèves, mieux former les enseignants à la prise en compte de l’individualisation des besoins tant en formation initiale qu’en formation continue.
Les Élèves à Besoins Éducatifs Particulier
Aujourd’hui nous pensons que nous devons innover dans l’aide apportée aux collègues face à des comportements d’élèves qui nécessitent des prises en charge pluridisciplinaires.
Nous pensons qu’il faut créer des lieux d’accueil dans certaines écoles afin que des élèves qui sont dans l’incapacité de suivre les enseignements puissent être scolarisés. Il ne s’agirait pas de lieux d’accueil permanent pour ces élèves mais seulement de sas pour permettre à ces élèves d’expérimenter d’autres prises en charge. Ces lieux de scolarisation seraient animés par des personnels volontaires et formés à la gestion de crise clastique. Nous pensons que le renfort de Psy-EN serait une aide précieuse pour les collègues volontaires.
De même, nous pensons qu’il faudrait créer une équipe mobile d’intervention rapide pour assister les collègues en difficulté avec certains élèves. Les personnels volontaires seraient formés et se rendraient dans une école voire un collège pour assister les collègues le temps que les parents puissent venir prendre en charge leur enfant. Ces personnels volontaires pourraient être mis à disposition dans des écoles de rattachement en soutien des équipes éducatives.
Nous avons bien conscience que nos demandes ne correspondent pas à ce qui est possible financièrement actuellement. Mais nous pensons qu’il est temps de changer de point de vue et de réfléchir à une nouvelle manière de protéger les collègues et d’accueillir les Élèves à Besoins Éducatifs Particuliers car depuis des années nous sommes confrontés aux mêmes difficultés et les collègues se sentent abandonnés par l’Institution.