Pourquoi aller voir le film La Syndicaliste ?

Maureen Kearney, aujourd'hui à la retraite, a longtemps été déléguée CFDT au sein du groupe AREVA. Lanceuse d'alerte, elle a été victime de menaces puis d'agression jamais élucidées et accusée d'être une affabulatrice.

Maureen Kearney
Première du film « La Syndicaliste » organisée par CFDT Cadres début mars 2023

Depuis sa sortie, le film de Jean-Paul Salomé a été largement commenté et Maureen Kearney largement interviewée, y compris dans les colonnes de nos différents journaux CFDT et c’est bien normal puisque responsable syndicale CFDT chez AREVA elle a été soutenue et défendue par notre syndicat à l’époque des faits.

Le 17 décembre 2012 elle est retrouvée chez elle ligotée, violée, avec la lettre A scarifiée sur son ventre. Une enquête est ouverte mais, en quelques semaines à la suite de cette agression, elle va passer du statut de victime à celui d’affabulatrice.

Il lui faudra attendre des années avant de faire reconnaître la réalité des faits au cours d’un procès en appel dont le coût sera supporté par la CFDT.

On reproche à ce film de ne pas avoir assez mis en valeur le rôle de la CFDT, pourtant notre organisation est bien présente. Dans plusieurs scènes ses collègues, des militants CFDT agissent ou interagissent avec Maureen Kearney. Et Maureen Kearney le dit elle-même ; sans le soutien constant de la CFDT elle n’aurait jamais pu aller jusqu’au bout.

En fait dans ce film le metteur en scène a pris le parti de raconter une histoire de femme : une femme, cadre dans une grande entreprise (dont la patronne est aussi une femme), militante syndicale, lanceuse d’alerte (elle dénonce le rapprochement d’AREVA avec la Chine, cause probable de son agression).

Il faut donc voir ce film parce que c’est un beau portrait de femme, d’une période de sa vie où on voit la difficulté d’être une femme en entreprise, le machisme toujours présent (les petites phrases assassines, les propos déplacés, les ricanements…), décuplé par le fait qu’elle est syndicaliste.

On voit aussi comment la police et la justice avant #metoo traitent les victimes de viol !

On ne reconstitue même pas la scène pour prouver qu’elle n’a pas pu se ligoter elle- même, on essaie de lui faire croire que son mari, sa famille, ses amis, ses collègues, la lâchent parce qu’elle aurait tout inventé.

Maureen Kearney n’est pas crue parce qu’on ne tient pas compte de l’état de sidération dans lequel elle se trouve et de l’incapacité à réagir quand une agression de ce type se produit.

Ce phénomène a maintenant été décrit par de nombreuses femmes victimes de viol.

Voilà pourquoi cette syndicaliste, c’est d’abord une femme qui paie cher, qui paie dans sa chair et dans son corps son engagement au service de toutes et tous.

Il faut donc voir le film « La Syndicaliste » par le biais d’un regard engagé aussi pour la cause des femmes.

Béatrice Clément
membre du conseil de l’Union fédérale des Retraités Sgen-CFDT